Alors que Joe Biden se dirige vers une victoire de plus en plus certaine lors de la convention démocrate, la question de l’identité de sa vice-présidente occupe les quelques discussions qui échappent encore à la pandémie actuelle. Nous parlons de bien de sa vice-présidentE, car le candidat s’était engagé, lors du débat démocrate du 15 mars 2020, à choisir une femme pour l’accompagner sur le bulletin en novembre.
Plus que jamais, le choix d’une vice-présidente revêt un enjeu stratégique majeur pour Biden. En effet, une fois intronisé par son parti, il deviendra, à 78 ans, le candidat présidentiel le plus âgé de l’histoire des Etats-Unis. Mais, au-delà de questions purement successorales, le choix d’un.e colistier.e résulte généralement de considérations stratégiques visant à combler les lacunes politiques du candidat principal.
Ainsi, Biden lui-même avait apporté son expérience aux côtés d’un Barack Obama relativement neuf en 2008. Le choix peut aussi servir à sécuriser un État en balance décisif dans la course au collège électoral. Par exemple, en 2016, Hillary Clinton avait opté pour le sénateur de Virginie Tim Kaine, pensant, probablement à tort, que l’État jouerait un rôle central dans la décision finale. De même, Donald Trump, pourtant pas un parangon de vertu chrétienne, s’est assuré depuis 2016 le soutien indéfectible d’une grande majorité d’évangélistes grâce son vice-président, Mike Pence.
Pour Biden aussi, il s’agira de trouver une candidate à la fois complémentaire et capable de reprendre son discours, de combler ses faiblesses tout en accompagnant clairement sa direction politique. Nous l’évoquions en introduction, son âge en fait un Président potentiellement fragile, plus exposé que ses prédécesseurs à la maladie et aux affres de la vieillesse. On imagine donc qu’il cherchera une candidate plus jeune que lui, ce qui exclut d’emblée quelqu’un comme Nancy Pelosi, qui vient de fêter ses 80 ans.
D’autre part, la campagne aux primaires a révélé les diverses fractures au sein du Parti démocrate, oppositions de principe illustrées par l’affrontement final entre Biden et Sanders. Bien qu’ayant remporté assez largement l’investiture, Biden reste politiquement éloigné des franges progressistes de son propre parti. Là encore, une candidate en odeur de sainteté dans les courants de gauche du Parti pourrait faciliter l’unité du parti avant le duel de novembre.
Enfin, s’il est extrêmement populaire au sein des communautés afro-américaines, Biden n’a pas particulièrement brillé auprès des latinos lors des primaires. Un point qui pourrait s’avérer décisif dans son choix, sachant que les latinos peuvent faire basculer des États importants comme la Floride, le Nevada ou encore l’Arizona. Alors, qui pour accompagner Joe Biden en novembre ?
Kamala Harris
Candidate malheureuse à la primaire démocrate de 2020, Kamala Harris fait partie des noms qui reviennent avec insistance pour accompagner Biden. Assez largement en tête sur les sites de paris, elle avait notamment brillé lors du premier débat pour l’investiture en 2019, en s’attaquant justement à l’ancien vice-président sur les questions raciales.
En tant que femme afro-américaine, elle participerait à la mobilisation massive des électeurs noirs du Parti démocrate qui avaient pu faire défaut à Clinton en 2016, faute de participation. De plus, à 55 ans, elle représente la nouvelle génération de sénateurs démocrates, élue en Californie en 2016. Aux côtés du très expérimenté Biden, elle pourrait représenter une relative fraîcheur au sein de l’establishment politique de Washington.
Néanmoins, plusieurs limites grèvent sa candidature. Son positionnement idéologique comme « pragmatique modérée » en a fait la cible des critiques progressistes lors de la campagne récente. Son passé de procureur général de Californie et ses positions sévères sur la justice en ont fait une cible favorite de l’aile gauche du Parti. De même, en tant que sénatrice de Californie, son apport stratégique de voix parait peu substantiel : là où certaines de ses concurrentes pourraient se targuer de ramener des États en balance dans l’escarcelle de Biden, la Californie de Harris ne devrait pas échapper aux démocrates, que la sénatrice soit sur le bulletin ou non.
Enfin, de façon presque cynique, se pose la question du gain réel d’une candidate afro-américaine pour accompagner Biden. Plus encore qu’Hillary Clinton, ce dernier est déjà extrêmement populaire auprès de cette communauté, qui a grandement aidé à le propulser comme candidat du parti lors des primaires. Pis encore, le soutien rapide et clair de Barack Obama, qui semble enclin à s’engager dans la campagne à venir, pourrait bien valoir toutes les vice-présidentes possibles.
Elizabeth Warren
Un temps favorite de la primaire démocrate en cours, Warren a ensuite doucement glissé au second plan, éclipsée par Joe Biden et Bernie Sanders. Une fois passé l’enthousiasme de sa campagne éducative, son positionnement de progressiste plus consensuelle l’a rendue moins séduisante que Sanders pour l’aile gauche, tout en ne rassurant pas les socio libéraux de la droite du parti.
Néanmoins, comme colistière, elle pourrait être un pont idéal entre Joe Biden et les ex-soutiens de Sanders. Depuis 2016, elle s’est imposée comme une des meneuses de la gauche du Parti démocrate, en en soutenant les idées majeures telles que la mise en place d’un système d’assurance maladie universel ou la réforme en profondeur de l’ICE. Sans même parler de sa popularité et de sa visibilité, elle qui a longtemps été considérée comme la plus à même de se glisser entre Biden et Sanders pour la course à l’investiture.
Ainsi, de prime abord, Warren semble constituer une vice-présidente idéale, avec un CV et une expérience impressionnante. On imagine aussi que le débat des vice-présidents qui la verrait s’opposer au fondamentaliste chrétien Mike Pence vaudrait certainement le détour. Seulement, son ajout sur le bulletin n’offrirait que de maigres avantages politiques pour Joe Biden.
Lors de la primaire, l’échec de Warren marqua surtout son inaptitude à dépasser son électorat traditionnel des blancs, éduqués et aisés. Bien qu’ayant notamment misé sur la séduction des classes populaires blanches du Midwest, Warren n’a jamais vraiment réussi à capter ces populations, bien plus proches de Biden. De même, elle n’a pas eu beaucoup plus de succès auprès des communautés noires et latinos, acteurs majeurs des coalitions démocrates contemporaines.
Qui plus est, en tant que sénatrice du Massachusetts, elle n’offrirait même pas un levier intéressant dans un État en balance. En effet, s’il y a bien un État qui certain d’échouer dans l’escarcelle démocrate en novembre, c’est celui qui héberge Harvard et le Massachusetts Institute of Technology (MIT), où le trumpisme ne rencontre quasiment aucun écho. En 2016, l’Etat de Warren fut l’un des trois à dépasser les 60% de vote pour Clinton, avec le Maryland et la Californie.
Dans les faits, choisir Warren permettrait d’arrimer des votes progressistes qui, selon toute probabilité, se seraient ralliés à Biden quoiqu’il arrive. À l’inverse, avec Warren, Biden n’accroitrait pas ses chances auprès de populations clés et dans les États les plus importants, notamment au sein de la Rust Belt et du Midwest en général.
Amy Klobuchar
À la mi-février, une belle performance en débat avait propulsé Amy Klobuchar à la 3eme place de la primaire du New Hampshire. Rapidement, elle s’était positionnée comme une alternative crédible à Joe Biden et Bernie Sanders. Soutenu par les éditorialistes du New York Times, son klobentum faisait la délectation des modérés sur les réseaux sociaux. Malheureusement pour la sénatrice du Minnesota, le soufflet est rapidement retombé et, alors que le Super Tuesday approchait, Klobuchar jeta l’éponge pour soutenir Biden.
Capable de briller dans les débats comme à la tribune, Klobuchar serait un atout de choix pour Biden. Alors que ce dernier a montré quelques signes de faiblesses pour enflammer les foules, Klobuchar revendique une proximité (réelle ou imaginée) avec les classes moyennes et populaires qui en font une rhétrice de choix. De même, en tant que sénatrice du Minnesota, elle peut jouer un rôle central dans l’attribution des États du Midwest qui avaient fait défaut à Clinton il y a 4 ans. Enfin, idéologiquement, elle n’aurait aucune difficulté à défendre les positions du candidat présidentiel, notamment sur les questions de santé, elle que l’on pourrait placer encore plus à droite que Biden.
Néanmoins, cette orientation social-libérale pourrait aussi handicaper sa candidature. Au sein de la primaire démocrate, elle faisait partie de ceux qui, au Congrès, avaient le plus souvent voté en accord avec la ligne définie par Donald Trump. Plus généralement, elle s’est montrée virulente contre les plans d’assurance maladie universelle défendus par Warren et Sanders, politiques relativement populaires au sein de l’électorat démocrate.
Au-delà de l’avantage relativement modeste que Klobuchar offrirait pour élargir la coalition électorale de Biden, sa réputation a été écornée pendant la primaire, avec plusieurs témoignages d’anciens subordonnés décrivant sa gestion tyrannique du personnel. Un élément sur lequel l’opposition républicaine, toute honte bue, n’aurait aucun mal à appuyer au moment de la campagne. Surtout, comme Warren, Klobuchar est politiquement inexistante auprès des minorités afro-américaines et latinos. Un point faible qui pourrait lui coûter cher au moment du choix final.
Tammy Baldwin
Élue au Congrès depuis 2000 et sénatrice du Wisconsin depuis 2012, Tammy Baldwin est une des politiciennes les plus expérimentées de cette liste. N’ayant pas participé à la dernière primaire démocrate, elle est mécaniquement moins en vue que Warren, Harris ou même Klobuchar. Pourtant, son profil coche nombre de cases qui pourraient convaincre Biden.
Géographiquement, en tant que sénatrice extrêmement populaire du Wisconsin, elle ferait presque assurément basculer cet état dans l’escarcelle de Biden. Là encore, comme pour Klobuchar, Baldwin offrirait un ancrage majeur dans une région pivot, le Midwest. Mais contrairement à sa consœur du Minnesota, Tammy Baldwin serait parfaitement à même de mobiliser l’aile gauche du Parti.
Se décrivant elle-même comme progressiste, elle est une des élues les plus à gauche du Congrès. Dès 2002, elle était une opposante vocale à la guerre en Irak et, depuis, s’est positionnée sur la plupart des sujets comme une des figures de la gauche américaine : assurance maladie universelle, régularisation des sans-papiers, accroissement de la régulation des grandes entreprises ou encore durcissement du contrôle de la vente des armes. De plus, lors de son élection au Sénat en 2012, elle fut la première sénatrice ouvertement lesbienne.
Néanmoins, comme pour Warren, ce positionnement trop à gauche, bien que garantissant la présence des progressistes dans les urnes, pourrait aliéner une partie de l’électorat indépendant qui serait encore hésitant. Pis encore, malgré son profil « en vogue », Baldwin manque encore de reconnaissance à l’échelle nationale et sa nomination n’aurait pas le même impact que celui d’une Elizabeth Warren (dans la même ligne politique) ou d’une Amy Klobuchar (dans le même secteur géographique).
Catherine Cortez-Masto
Alors que la discussion sur le choix de la candidate à la vice-présidence s’intensifiait, plusieurs articles ont relayé l’affection que portait Biden à Catherine Cortez-Masto. Si on en croit les sources au sein du Parti, elle ferait même partie du top 3 du candidat. Une information à prendre avec des pincettes puisqu’elle nous vient principalement de Harry Reid, son prédécesseur qui l’avait immédiatement soutenue lorsqu’il avait décidé de ne pas se représenter comme Sénateur du Nevada.
Élue en 2016, Cortez-Masto est devenue la première femme d’origine latino-américaine à accéder à la Chambre haute. De toutes les candidates de cette liste, elle est la seule issue de cette minorité, un atout non négligeable : s’il est extrêmement populaire auprès des Afro-Américains, Biden peine grandement à faire son trou auprès des latinos. Une colistière latina serait un geste fort, capable d’influencer les résultats d’États importants comme la Floride ou l’Arizona, gagnés d’une courte tête par Trump en 2016.
Politiquement, elle coche la plupart des cases des élus démocrates : renforcement du contrôle des armes, réforme en profondeur de l’ICE (Immigration and Customs Enforcement, l’agence fédérale en charge des frontières), pro-choix et en faveur du mariage des personnes du même sexe. Sur la question de l’assurance maladie, elle se montre plus modérée que Baldwin et Warren, s’en tenant à un soutien sans faille à l’Affordable Care Act d’Obama et à son extension progressive. Lors de son élection au Nevada, une large partie de sa campagne s’axa sur l’environnement et la promotion des énergies renouvelables.
Son principal défaut reste son manque d’expérience et de visibilité. Élue depuis seulement deux ans au Congrès, elle est une des candidates les moins connues de cette liste. Cette nouveauté peut se révéler une arme à double tranchant : d’un côté, la fraicheur d’une nouvelle tête sur le devant de la scène, tactique classique et régulièrement utilisée en communication politique et, de l’autre, une vie personnelle et professionnelle qui n’est pas encore passée au peigne fin de la recherche d’opposition. Il n’y aurait pas pire moment qu’une campagne présidentielle pour révéler un passé trouble ou des problèmes lorsqu’elle était Procureur générale du Nevada entre 2007 et 2015.
Stacey Abrams
Lors des midterms de 2018, la campagne au poste de Gouverneur de Géorgie se trouva au centre de l’attention. La raison ? Stacey Abrams, femme afro-américaine progressiste, en lice pour s’imposer dans un des États les plus marqués par l’histoire raciste américaine. Soutenue par Bernie Sanders et Barack Obama, Abrams s’inclina d’une courte tête face à Brian Kemp dans des circonstances suspectes. Ce dernier fut notamment accusé d’être juge et partie de l’élection en tant que Secrétaire d’État de la Géorgie, et d’avoir purgé les registres électoraux, privant de vote des milliers de personnes, principalement au sein des populations les plus pauvres et des minorités ethniques de l’État.
Cette défaite ultramédiatisée a fait d’Abrams une des égéries de la gauche progressiste américaine. Son choix sur le ticket de Biden serait l’assurance d’une mobilisation massive de l’aile progressiste et d’une percée importante au sein de la communauté afro-américaine. Plus généralement, Abrams est extrêmement populaire au sein des jeunes électeurs, un segment que Biden (comme la plupart des candidats contemporains) peine considérablement à mobiliser.
Un pari qui pourrait s’avérer risqué, en témoigne la récente campagne de Sanders : sociologiquement, les jeunes votent beaucoup moins que leurs aînés. Baser une partie de sa stratégie sur le fait d’arriver à les faire aller aux urnes pourrait rapidement se retourner contre le candidat démocrate si, conformément aux tendances des dernières décennies, ces mêmes jeunes restaient chez eux.
Surtout, avec son échec en Géorgie, Abrams est la seule candidate de cette liste à n’avoir jamais remporté une élection nationale. Un point qui n’a pas empêché Trump de voler vers la victoire en 2016 mais qui pourrait jouer contre Abrams lors d’une campagne à couteaux tirés. On sait notamment qu’à expérience égale, les exigences posées envers les femmes sont plus élevées que pour les hommes. Ce qui est un vent de nouveauté bienvenue chez un homme pourrait vite devenir une absence incompréhensible d’expérience et de compétence chez une femme.
Gretchen Whitmer
Comme Baldwin et Klobuchar, le choix de Whitmer s’inscrirait dans l’évidente stratégie du Midwest, visant à reconquérir les électorats blancs cédés à Donald Trump dans ces régions industrielles et post-industrielles. En 2018, elle est devenue Gouverneur du Michigan avec presque 10 points d’avance sur son opposant républicain. Placée dans le courant social-libéral cher à Biden, elle participerait à la reconquête des électeurs indépendants et d’une partie des classes moyennes et populaires blanches qui avaient fait défaut à Clinton il y a 4 ans.
De plus, toujours dans cette perspective stratégique, elle part avec un avantage sur Klobuchar. L’État de cette dernière, le Minnesota, avait déjà voté pour Clinton en 2016, alors que le Michigan de Whitmer avait donné la victoire à Trump pour 0.3%. Une marge infime qui serait facilement retournée par le choix d’une personnalité populaire comme Whitmer.
Par ailleurs, bien qu’ayant un profil public moins visible que Klobuchar, le Michigan est devenu le centre de l’attention médiatique depuis la mi-avril. En cause, l’émergence de groupes d’opposition aux mesures de confinement pour lutter contre le COVID-19, groupes proches du Trumpisme et d’associations de défense du port d’arme. Si la situation est potentiellement dramatique pour le Michigan, elle pourrait s’avérer une opportunité idéale pour démontrer que Whitmer est capable de tenir le cap lors d’une crise sanitaire, et potentiellement institutionnelle, grave.
À l’inverse, comme pour les autres candidates social-libérales de cette liste, le choix Whitmer ne serait pas de nature à exciter les progressistes. Récemment, elle s’est opposée à la suppression de l’ICE et à l’assurance maladie universelle, deux axes majeurs portés par l’aile gauche du Parti démocrate. De même, au-delà de sa récente notoriété, son profil national reste encore relativement discret.
Tammy Duckworth
Dans l’ordre de succession des candidates à la vice-présidence, Tammy Duckworth se trouve probablement assez bas sur la liste. Peu connue, la sénatrice de l’Illinois née en Thaïlande présente pourtant un profil intriguant, qui pourrait s’avérer être un atout majeur dans la manche de Biden. Au-delà de son profil ethnique, qui en fait la seconde femme d’origine asiatique élue au Congrès de l’histoire, Duckworth possède une histoire personnelle qui détonne.
Membre de la garde nationale de l’Illinois, elle fut déployée en 2004 lors de la guerre en Irak alors qu’elle préparait un doctorat en science politique. Pilote d’hélicoptère, elle perdit les deux jambes lorsque son Black Hawk fut abattu par des combattants irakiens. Nommée directrice des Veterans Affairs de l’Illinois à son retour, elle devient en 2012 la première élue amputée au Congrès américain.
En tant que Sénatrice de l’Illinois, elle possède cet ancrage dans le Midwest si important pour la carte électorale de 2020, bien que l’État fût bleu lors de la campagne présidentielle précédente. Politiquement, son alliance avec Biden parait relativement évidente, elle qui se situe dans les courants modérés et socio libéraux du parti sur la plupart des axes qui dominent la discussion démocrate actuelle.
Paradoxalement, son profil d’ancienne combattante estropiée et décorée, qui aurait été un atout indiscutable il y a 5 ans, pourrait aujourd’hui être un angle d’attaque pour les républicains les plus radicaux. On se souvient de la façon dont Trump singeait une journaliste en fauteuil ou comment il avait moqué John McCain, déclarant préférer les soldats qui ne sont pas fait capturer.
Le choix d’un candidat à la vice-présidence ne suit pas toujours une logique parfaite. Si les candidates du Midwest semblent aujourd’hui se détacher, Biden pourrait très bien fait un choix tout autre, et décider de prendre quelqu’un comme Susan Rice : conseillère à la sécurité nationale sous Obama, ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU, son CV ferait pâlir la plupart des prétendantes. Issue de la communauté afro-américaine, elle présente le désavantage majeur de n’avoir jamais connu l’expérience des urnes.
De même, les choix qui semblent parfois les plus rationnels s’avèrent parfois être désastreux pour la suite de la campagne. On se souvient de la nomination de Sarah Palin comme colistière de John McCain en 2008, cherchant à sécuriser les électorats conservateurs et féminins. Une option surprenante au départ, mais qui avait une logique aisément saisissable, et qui se retournera contre le Parti républicain lorsque Palin multiplia les fautes politiques et les approximations. Paradoxalement, si elle semblait hors du cadre en 2008, on ne peut s’empêcher de remarquer la similarité de ses positions antiélitistes et conservatrices avec celles qui dominent le Parti républicain depuis 2016.
De fait, le choix d’un vice-président n’est jamais innocent. À court terme, il indique la stratégie choisie par le candidat, que ce soit d’un point de vue des groupes électoraux ou des régions clés sur la carte électorale. À moyen et long terme, il peut être annonciateur des tendances profondes au sein du parti, en laissant la place à des courants importants mais pas encore majoritaires. Enfin, pour la personne choisie, il représente une opportunité politique et un tremplin médiatique majeur, capable de propulser une carrière comme d’annihiler toute possibilité de projection future en cas d’échec.